Au trot, Papa Noël !

Chez nous, c'est à cheval que le Père Noël distribue... des papillotes. Il s'appelle Mikulás, Szent Miklos (Saint Nicolas), c'est donc le 6 décembre. En Hongrie, c'est lui le Père Noël. Et le 25 décembre ? C'est le Petit Jésus qui met les cadeaux sous le sapin.


Dans la cour du collège réformé, les Mikulás sonnent les cloches. Crédit photo M.H.

Le Père Noël s'est levé tôt ce matin au nord-est de la Hongrie. Il fait encore nuit. Enfin, les Pères Noël, car ils sont plusieurs. Oui ils sont cinq, dont une Mère Noëlle, écriture inclusive oblige. Avec leurs Krampuszok, les petits diables qui distribuent les fessées pour les enfants pas sages, ils se préparent. Ils ne sont ni dans une fabrique de jouets, ni dans une forêt magique. Ils sont dans un endroit qui fleure bon le crin et le fumier.

Derrière le gosier

Le troupeau se met en branle en plein brouillard. Il traverse les champs au bruit des clochettes et s'enfonce au lever du jour dans la ville à peine éveillée. Première étape : Weinberg, la plus grosse et la plus riche entreprise de Sárospatak (fabrication d'entrepôts). Les employés sortent des bureaux avec un plateau de verres remplis de palinka (eau-de-vie hongroise, c'est la dernière fois que je le dis). Et oui, Mikulás attaque fort sa journée. On l'appelle aussi Télapo (Père Hiver) mais le mot rappelle l'ère communiste, époque où l'église était bannie. Mikulás ou Télapo, il s'en met une derrière le gosier et continue sa route.

Petit cadeau de Babel.
Crédit photo Lászlo Szilvi

Au son des clochettes et au petit trot énergique, la troupe enchante la ville de ses clop clop et laisse partout où elle passe deux sortes de cadeaux. Des szaloncukor, des papillottes au caramel, à la noix de coco, au chocolat, mais les enfants s'arrachent les zselés (une espèce de gelée ferme et translucide). Et de jolis paquets chauds et odorants, ronds, idéaux pour faire grandir les plantes. Pas toujours appréciés, paraît-il. Parfois, un jet de jus de citron aussi, mais trop acide pour les estomacs fragiles.

C'est une véritable visite touristique commerciale de la ville. Tout y passe : la station essence, la fabrique de papillotes, l'usine de céramique, l'opticien, le marchand de rideaux, le château Pajzos-Megyer (vin de Tokaj, la encore c'est la dernière fois), le magasin de jardinage, la supérette, la boutique de fleurs... La mairie, bien sûr, où un verre de thé chaud et sucré nous attend, la Maison de la culture à l'architecture organique, le Mozi (cinéma), l'Idősek és Fogyatékosok Otthona (hôpital psychiatrique), le marché aussi ET  le Huszár, le restaurant de Barna (le Mikulás à la grosse barbe). Bien sûr, toutes les écoles de la ville sont écumées. C'est là que Mikulás se mue en feu Johnny : les foules se déchaînent, entonnent une chanson en leur honneur, les maternel(le)s hurlent de joie et se ruent sur la pluie de friandises.

Mrs Doubtfire chez le rhumato

C'est au collège réformé (le Reformatus Gimnázium) que les frissons me viennent : lorsque les chevaux passent sous le porche de cet honorable établissement du XVe siècle, descendent délicatement les quelques marches et pénètrent dans la cour aux vieux pavés. Attirés par le bruit des cloches, les lycéens sortent sur le pas de la porte et nous offrent leur chant de Noël.
Mais voilà qu'en pleine distribution de crottins et de sucreries, la Mère Noël doit s'absenter. Cela fait deux mois qu'elle a réussi à obtenir un rendez-vous chez le rhumatologue. Je laisse mon cheval entre de bonnes jambes et fonce au sous-sol du dispensaire. Horreur : vingt personnes patientent dans la salle d'attente. Vingt paires d'yeux qui me fixent, ébahis. Je ne bouge plus, réalisant que j'ai peut-être oublié d'enlever quelque chose. Vous connaissez la scène de Mrs Doubtfire où Robin Williams se trompe de table au restaurant ?

Sur la place centrale de Sárospatak, un Père Noël vole un enfant.
Crédit photo Lászlo Szilvi

De temps en temps, il faut faire le plein.
Crédit photo Lászlo Szilvi



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